Agenda

Samedi 30 mars, à 14h à La Boutique, Reprendre la terre aux machines, séance d’arpentage

Un atelier ouvert à toustes

Reprendre la Terre aux machines, un ouvrage écrit par les membres du collectif l’Atelier Paysan

 

Le temps joue pour nous : les AMAP, la Bio et les circuits courts apparaissent de plus en plus dans les médias comme dans nos assiettes – l’opinion publique est acquise. Si chaque consommateur change ses habitudes alimentaires, si chaque agriculteur se forme à l’agroécologie, alors la victoire est au bout de la fourchette. Ceci est une fable.

L’appel à la responsabilité individuelle, ce « chacun doit faire sa part », ne mettra jamais fin au modèle alimentaire industriel et marchand. Celui-ci est une machine à produire artificiellement au moindre coût, une machine à confisquer les savoirs et savoir-faire, à enrichir les industries technologiques, à déshumaniser.

Il est temps d’échapper à notre enfermement dans les niches d’un marché alimentaire réservé aux classes aisées et de reprendre entièrement la terre aux machines. Ce manifeste propose de sérieuses pistes de rupture.

L’Atelier Paysan accompagne la conception et le colportage des technologies paysannes. Les auteurs, paysans, syndicalistes et militants, sociétaires de la coopérative, font le constat que les alternatives paysannes, aussi incroyablement riches soient-elles, s’avèrent totalement inoffensives face au complexe agro-industriel, plus prédateur que jamais.

 

L’accès à l’écrit long est un enjeu majeur de l’émancipation. Des syndicalistes à partir de la fin du XIXe et du début du XXe l’ont bien compris. Lors de négociation ou simplement d’une refonte d’un règlement ou d’une loi, la nécessité de prendre connaissance parfois très rapidement de textes juridiques complexes, souvent à dessein, leur a fait développer la technique de l’arpentage.

Le principe est simple : on se rassemble à un certain nombre, on compte le nombre de pages à lire, on divise par le nombre de participants et on se répartit équitablement des lots de pages. Chacun résume ensuite, lors d’un travail de mise en commun, ce qu’il a lu et on se retrouve avec un condensé de l’ensemble accessible à tou·tes.

Dans un texte théorique, en philosophie ou en sciences économiques et sociales par exemple, mais aussi en littérature, on peut de cette façon aborder collectivement des textes difficiles d’accès. L’arpentage peut se faire à toutes échelles, sur tous supports.

Avec un livre, l’expérience montre une certaine multiplicité des pratiques. Ainsi l’arpentage « pur », le plus provocateur, consiste à découper (au sens physique) un exemplaire de l’ouvrage en tant de blocs d’un nombre fixe de pages, sans jamais tenir compte du découpage en chapitres, préfaces, etc.

On peut aussi se contenter de désigner à chacun le numéro des pages qu’il aura à lire : c’est moins spectaculaire, mais ça permet une appropriation du livre.

L’arpentage est un exercice émancipateur à plusieurs niveaux : il permet de désacraliser le livre, objet impressionnant en soi, surtout s’il comporte beaucoup de pages ; il permet de sortir la lecture de sa représentation solitaire sans perdre l’expérience intime de la découverte du texte : il implique une parfaite égalité de traitement de tou·tes les participant-es, pas seulement parce qu’ils et elles ont le même nombre de pages, mais aussi parce qu’ils et elles ont la responsabilité de rendre compte de leur partie au collectif.

Des courants conservateurs ne s’y sont pas trompé, lors de la première publication d’une pratique d’arpentage il y a quelques années, qui a donné lieu à un shitstorm violent sur les réseaux sociaux. En désacralisant le livre, l’arpentage provoque aussi la mise en cause de l’aspect élitiste du lettré solitaire. On revient à des expériences de lecture plus anciennes, presque de l’ordre de la veillée.